PROTOTYPE D'ASSISTANT ERGONOMIQUE ROBOTISÉ


    Plusieurs des technologies développées dans le cadre de la thématique de recherche coopération humain-robot ont été mises à l'épreuve dans un prototype d'envergure conçu pour répondre aux besoins du partenaire industriel GM Canada. Il s'agit d'un assistant ergonomique robotisé aidant les travailleurs à la manutention de lourdes composantes et leur assemblage dans des véhicules. Plus spécifiquement, l'application visée est l'installation des tableaux de bord, pré-assemblés dans une usine différente de celle où se situe l'assemblage final. Il s'agit d'une tâche difficile puisque la charge, pouvant atteindre 113 kg, doit être déplacée puis installée typiquement à toutes les 75 secondes.

    Pour cette tâche, les degrés de liberté nécessaires sont les translations dans toutes les directions ainsi que la rotation par rapport à un axe vertical. Pour des raisons de sécurité, les vitesses sont limitées à 1 m/s pour les deux directions horizontales, à 0.25 m/s pour les déplacements verticaux et à 1 rad/s pour la rotation. Les accélérations sont quant à elles limitées à 1 m/s2 pour les directions en translation et 1 rad/s2 pour les rotations. Les figures 1 et 2 présentent une vue d'ensemble du prototype d'assistant ergonomique robotisé.

    Fig. 1 : Vue d'ensemble de l'assistant ergonomique robotisé.
    Fig. 2 : Photo de l'assistant ergonomique robotisé.

    Plusieurs moyens ont été mis en oeuvre pour réduire la masse et la puissance du prototype. Tout d'abord, les actionneurs sont déportés à la base à l'aide de systèmes de routage par courroie crantée (un câble pour les déplacements verticaux). Il est à noter que les systèmes de routage sont tous découplés, de telle sorte que l'actionneur en X ne créera pas de déplacements en Y, Z ou Theta et vice versa. Déporter les actionneurs à la base permet de diminuer l'inertie en mouvement et donc les efforts que doit appliquer le prototype afin d'atteindre les performances requises. La figure 3 présente les routages de courroies crantées pour les déplacements en X, Y et Theta.

    Fig. 3 : Routages d'actionnement en X, Y et Theta de l'assistant ergonomique robotisé.

    Pour les déplacements verticaux, un système d'équilibrage de la gravité par contrepoids est utilisé en plus de la déportation de l'actionneur. Puisque le routage par câble est découplé des autres routages, les mouvements en X, Y et Theta ne perçoivent pas l'inertie additionnelle provenant du contrepoids. De plus, puisque le contrepoids est mobile sur un levier, il est possible de l'ajuster pour compenser différentes charges. Ainsi, l'actionneur effectuant les déplacements verticaux doit appliquer un effort équivalent à la friction du routage et l'inertie de la charge (et du contrepoids), mais pas son poids. Pour des déplacements avec de faibles accélérations, le résultat est une puissance grandement réduite pour l'actionneur en Z. Le routage du câble et le système d'équilibrage variable sont représentés sur les figures 4 et 5, respectivement.

    Fig. 4 : Routages d'actionnement et d'équilibrage pour les déplacements verticaux.
    Fig. 5 : Système d'équilibrage variable.

    Du point de vue de la conception, la masse du prototype fut réduite en utilisant l'aluminium plutôt que l'acier pour plusieurs composantes. Aussi, l'effecteur a été conçu de façon à ce que le centre de masse de la charge soit situé sur l'axe de rotation. En plus de réduire l'inertie en rotation du prototype (et donc la puissance de l'actionneur associé à ce mouvement), cette simple mesure permet de diminuer les efforts en flexion que doivent supporter l'effecteur et le chariot. La masse de ces composantes est donc réduite sans diminuer leur robustesse. Pour y arriver, l'effecteur est conçu en forme de C, plutôt qu'en forme de L, en prenant soin que le tableau de bord puisse être inséré à l'intérieur d'une voiture sans entrer en interférence avec le toit. Les deux types d'effecteur possibles sont illustrés à la figure 6.

    Fig. 6 : Structures possibles pour l'effecteur de l'assistant ergonomique robotisé.

    Pour mesurer les intentions de l'usager, une poignée composée de photointerrupteurs et de mécanismes compliants est utilisée. Celle-ci permet de mesurer les efforts associés aux degrés de liberté du manipulateur. Le bruit électromagnétique du signal de sortie est très faible et celui-ci ne dérive pas dans le temps, ce qui constitue un avantage notable par rapport aux alternatives commerciales. Les forces sont mesurées avec précision jusqu'à 40 N, bien que la poignée soit conçue pour supporter de plus grands efforts par souci de robustesse. La figure 7 présente un modèle CAO de la poignée développée.

    Fig. 7 : Poignée de l'assistant ergonomique robotisé.

    La sécurité est un enjeu majeur dans la conception d'un assistant ergonomique robotisé pouvant soulever de lourdes charges. Les normes industrielles ne permettent généralement pas qu'un simple ordinateur puisse contrôler directement un robot. On préfère des automates programmables qui, bien qu'étant plus fiables, ne possèdent pas la flexibilité nécessaire pour implémenter des algorithmes de commande complexes.

    Afin d'obtenir un contrôleur flexible et sécuritaire, un automate programmable dédié à la sécurité est utilisé. Celui-ci supervise constamment l'ordinateur contrôlant le robot et peut par exemple intervenir en actionnant les freins si l'ordinateur ne répond plus. L'automate programmable est également responsable de la gestion des trois modes d'opérations. Le mode autonome permet au manipulateur de se déplacer sans intervention humaine pour, par exemple, aller chercher la prochaine pièce à assembler. Le mode interactif est le mode principal où l'usager commande l'assistant robotisé via la poignée sensible. Finalement, le mode non motorisé permet de désactiver les moteurs et les freins afin de déplacer le manipulateur manuellement, ce qui est utile pour libérer la chaîne d'assemblage dans le cas d'un bris majeur. La figure 8 présente le schéma du système de commande du prototype.

    Fig. 8 : Schéma du système de commande du prototype.

    Le prototype d'assistant ergonomique robotisé est un outil de développement important pour le laboratoire de robotique. Il permet d'étudier différents schémas de commande pour l'interaction physique humain-robot dans le cadre d'une application d'envergure réaliste. Ainsi, la robustesse des algorithmes développés est mise à l'épreuve, ce qui n'est pas possible avec les petits manipulateurs normalement utilisés en recherche.

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